Un gouvernement ne doit pas être un conglomérat d’ethnies
La manière de faire la politique au Tchad est assez connue de tous. A l’approche des élections, trois pelés et un tondu se retrouvent pour réclamer des postes de responsabilité au nom d’une ethnie. Cette comédie est assez connue. Cette mendicité politique aussi. Un gouvernement ne doit pas être un conglomérat d’ethnies et de gueux. Il y a plus de 200 groupes ethniques au Tchad. Il faut donc un gouvernement de plus de 200 ministres pour satisfaire tout le monde. Est-ce possible ? La compétence est individuelle et non ethnique. « Au bout de cette logique d’ethnisation, se joue le contrôle des privilèges d’Etat ».
L’usage de l’ethnicité pour se positionner dans la vie socioprofessionnelle plonge aujourd’hui l’État dans l’incapacité d’assumer ses fonctions et remet ainsi en cause le contrat social qui le fonde. Dès lors, les missions de l’État sont accomplies par des individus et des groupes d’individus. Cette situation consacre « l’effondrement de l’État »par la grâce « d’une clique de dignitaires qui ne tirent aucune légitimité populaire mais qui par les ficelles du nombrilisme et la détention des leviers politiques ont assujetti et relégué en seconde zone les autres « groupes ».
L’ethnicité est devenue l’arme préférée de certains leaders politiques et des élites dans leur quête du pouvoir d’État ou de positionnement social. Son usage fréquent dans le fonctionnement des affaires publiques renforce la déliquescence de l’État pour faire du Tchad un quasi «non-État». Dans cette logique, le pouvoir semble être exercé pour la satisfaction des intérêts particuliers. L’État (ou ce qui lui ressemble) est devenu une possession privée qui ne s’intéresse plus tellement à l’intérêt général. De cette façon, il semble être privatisé et finit par s’effondrer. Le recours à l’ethnicité dans la conquête et l’exercice du pouvoir et de l’emplacement social, renforce le fonctionnement informel de l’État pour justifier certains échecs qui nous bloquent.
Les pires dérives sont produites aujourd’hui au nom de l’ethnie. L’ethnie sert aujourd’hui de tribune aux tortueux de l’unité, aux incapables intellectuels, aux hommes sans opinions et aux gueux qui exploitent dans leur propre intérêt les rivalités entre différents groupes ethniques pour des miettes. Certains cherchent à politiser et/ou à privatiser l’ethnie. Mais les incitations à la haine, les discours identitaires n’auraient pas eu le même effet si certains intellectuels et certains élites n’avaient pas accepté de jouer le rôle de porte-parole des différents camps”. Facteur d’union, l’ethnisation est une fibre de désunion. C’est sur cette logique que s’appuie le système actuel". La notion d’Etat ou de Nation se disloque dans le repli villageois. L’Etat ne doit pas être redevable à une ethnie.Du fait que tout État démocratique se compose aujourd’hui d’appartenances multiples, puisqu’il repose sur le présupposé du « pluralisme social », la quête de bonheur collectif que symbolise en ce point précis le « nous » est inévitablement le fondement existentiel de l’État et appartient donc à son essence